À l’heure de l’austérité et des coupes budgétaires tous azimuts, le musée français n’a d’autre choix que de revoir son mode de gestion et sa structure économique s’il souhaite survivre. Focus sur un phénomène préoccupant pour l’avenir de l’exception culturelle française.


© A.G. Photographe 


Le musée, nouvelle marque postindustrielle 

Face au désengagement progressif de l’État, les musées réfractaires à l’idée de se subordonner au monde de l’entreprise ont du développer une nouvelle stratégie pour survivre. De musée-conservateur, ils sont devenus marque globale. Révolu le temps où le musée n’offrait que des murs auxquels suspendre des tableaux. Il devient désormais un système de divertissement à intégration horizontale complet. Rares – oserait-on dire inexistants ? – sont aujourd’hui les musées d’envergure nationale et internationale qui n’accueillent pas au minimum un café et une boutique. C’est qu’il faut bien pallier la diminution drastique des dotations publiques. Et l’on n’a pas trouvé meilleur pallium que la vente de produits dérivés et les consommations en tous genres, allant de la carte postale à la reproduction postérisée d’une œuvre, en passant par les casquettes, t-shirt et autres porte-clés aux couleurs du musée. 


 



Le Carrousel du Louvre, nouvelles Galeries Lafayette ? 

Sources : Mademoiselle & Mister (gauche), La Plume du Littré(droite) 

On appréciera donc que les musées ne soient plus aujourd’hui le tonneau des Danaïdes du ministère de la Culture et aient intégré la nécessité d’une plus grande rationalisation, d’une diminution des coûts et d’une optimisation des dépenses. Cependant, il ne faudrait pas qu’ils soient victimes, comme beaucoup d’autres institutions culturelles, de la «disneylandisation» de notre société.


Regards croisés : la France schizophrène 

On reconnaîtra, toutefois, que la France se bat vaillamment pour résister à cette tendance généralisée de mercantilisation à outrance de la culture, amorcée dès le début des années 1970 aux États-Unis. Comme souvent en matière patrimoniale, l’influence anglo-saxonne se révèle délétère. Aux États-Unis, il est de rigueur pour les musées d’être financé à majorité par des entreprises privées. La National Gallery of Art de Washington fait figure d’exception : il s’agit de l’unique institution américaine directement financée par l’État fédéral. Le plus souvent, le budget des musées se répartit comme suit : 10 % d’endowment (comprendre «dotations publiques»), 35 % de mécénat d’entreprise et de particuliers, 25% de fonds propres[1]. On remerciera aussi l’Oncle Sam et son dépositaire, l’américain Thomas Hoving, ancien directeur du Metropolitan Museum of Art de New-York qui, le premier, organisa ces fameuses expositions blockbusters et fit entrer le musée dès les années 1970 dans l’ère de la culture de masse. 

On notera dès lors la schizophrénie typiquement française qui semble agiter l’État, partagé entre la défense quasi chauvine de l’ «exception culturelle française » et son alignement progressif sur le modèle de l’homogénéisation anglo-saxon. Déjà à l’aune du XXIe siècle s’inquiétait Bourdieu que « l’indépendance, difficilement conquise, de la production et de la circulation culturelle à l’égard des nécessités de l’économie, se trouv[ât] menacée, dans son principe même, par l’intrusion de la logique commerciale à tous les stades de la production et de la circulation des biens culturels […], [qu’]à la mythologie de la différenciation et de la diversification extraordinaire des produits, l’on [puisse désormais] opposer l’uniformisation de l’offre, tant à l’échelle nationale qu’internationale : la concurrence, loin de diversifier, homogénéise, la poursuite du public maximum conduisant les producteurs à rechercher des produits omnibus, valables pour des publics de tous milieux et de tous pays.»[2]  

Les musées français se trouvent ainsi à l’heure actuelle dans une situation délicate. Confrontés à la réduction de plus en plus problématique des dotations publiques qui leur sont accordées – et qui risquent bien de disparaître purement et simplement dans les années qui viennent- ils n’ont d’autres choix que de modifier leur mode de gestion et diversifier leurs sources de revenus, le plus souvent pour le meilleur. Toutefois, il convient de mettre en garde contre la dérive mercantile et l’«entreprenarisation» à outrance qui les menacent ceux qui ont cédé trop facilement aux sirènes du financement facile, quitte à réduire leur fonction à celle de «pourvoyeurs de divertissements». Heureusement, ces derniers ne sont pour l’heure qu’une minorité, et les Français en mal de Beau et fiers de l’«exception culturelle» tricolore sauront les reconnaître.  


Cet article reprend en partie l'article originellement publié sur Trop Libre

[1] Art Media Agency. (2013, 28 août). Entre fonds publics et privés : le financement des musées. Repéré sur le site de l’Art Media Agency : http://fr.artmediaagency.com/78301/entre-fonds-publics-et-prives-le-financement-des-musees/

[2] Bourdieu, Pierre. (2001-2002). La marchandisation de la culture. Art actuel, n°80, 2001-2002, pp. 5-9.

À l’heure de l’austérité et des coupes budgétaires tous azimuts, le musée français n’a d’autre choix que de revoir son mode de gestion et sa structure économique s’il souhaite survivre. Focus sur un phénomène préoccupant pour l’avenir de l’exception culturelle française.


Des bienfaits des partenariats public-privé raisonnés 

Ne pouvant plus compter sur les dotations publiques pour financer leur fonctionnement, nombre de musées ont choisi, à raison, de s’associer à des entreprises privées pour continuer d’assurer leur fonction de préservation, de recherche et d’éducation. Sans ces partenariats publics-privés, la culture serait probablement vouée à la gentrification, du fait de ces coûts d’organisation d’exposition toujours plus importants. Depuis quelques années, l’accès à la culture s’est en effet démocratisé, et cela en partie grâce aux financements alloués par les entreprises privées aux institutions culturelles. Il est rare aujourd’hui qu’un musée ne propose pas de tarif étudiant ou la gratuité pour les demandeurs d’emploi, enseignants et bénéficiaires des minima sociaux. Entre 2005 et 2009, le volume des entrées gratuites a ainsi progressé de pratiquement 60 % quand celui des entrées payantes n’a augmenté que de 7 %[1] (une hausse en grande partie imputable à la mesure de gratuité à destination des jeunes de moins de 25 ans et des enseignants du Primaire et du Secondaire mise en place en 2009). De même, grâce à ces nouvelles sources de revenus annexes, l’offre culturelle s’est considérablement accrue. A côté des blockbusters sont nées des expositions plus intimistes, qui n’auraient jamais vu le jour sans le mécénat entrepreneurial, car trop coûteuses à organiser au vu du nombre de visiteurs attendus. Tandis qu’en 2003, la RMN (Réunion des Musées Nationaux) et les musées nationaux avaient organisé 19 expositions temporaires, ce sont plus d’une soixantaine qui ont vu le jour en 2009[2].

Sous l’impulsion des gestionnaires nouvelle génération que sont aujourd’hui les conservateurs, les musées français ont aussi fait peau neuve. Finies les expositions poussiéreuses auxquelles on se rend comme l’on entre dans un bar miteux par une nuit de décembre pour trouver chaleur et lumière. Aujourd’hui, les expositions sont résolument tournées vers le public et à l’écoute des jeunes. Il n’est plus ringard pour un adolescent de déclarer «avoir fait une expo», d’autant que celles-ci sont de plus en plus interactives, connectées et donc forcément modernes. Ainsi, le nombre de jeunes fréquentant les musées nationaux est passé de 3 à 4,8 millions entre 2000 et 2009 (bien que leur proportion dans la fréquentation de cesdits musées soit restée stable, autour de 16%)[3]. Sous l’influence de ces nouveaux conservateurs-entrepreneurs, le produit culturel devient aussi un objet «marketing» et est soumis aux mêmes règles que les biens courants. Les publicités pour les expositions se multiplient dans le métro et sur les abribus ; les affiches aux couleurs vives sont dorénavant «dans l’air du temps». On joue, on expérimente, on renouvelle. Un vent de fraîcheur souffle sur le monde culturel français. Il était grand temps ! 


Des partenaires de plus en plus gourmands : l’indépendance muséale, nouvelle chimère ?  

Cependant,  pour certaines entreprises, fini l’échange d’un gros chèque contre un logo sur l’affiche de promotion d’une exposition. De plus en plus, les partenaires des musées, publics comme privés, exigent davantage. L’on observe depuis quelques années une participation croissante des sociétés privées dans le budget des institutions culturelles. Si elles ne sont pas autorisées à participer aux frais de fonctionnement des musées publics – ultime chasse gardée de l’État – elles satisfont tout de même une part substantielle des besoins pécuniaires des expositions artistiques. Ainsi, si 40 % du budget du Palais de Tokyo – considéré comme association de Loi 1901, donc bénéficiant des mêmes avantages que les établissements publics à but non lucratif - proviennent des subventions étatiques, plus du tiers des 60% restants (soit près de 3,8 millions d’euros en 2014) sont assurés par des partenariats avec des sociétés privées (Orange, Total et McCann y figurent en bonne place) et 28 % par des privatisations d’espaces (2,8 millions d’euros)[4]. Pour Ana Teodorescu et Anne-Marie Hibbs, respectivement responsable développement économique et responsable développement et partenariats du Palais de Tokyo, il faut envisager «le mécénat comme un véritable partenariat, une relation qui profite pleinement aux deux parties»[5]. Et Jean de Loisy, ancien directeur de la Fondation Cartier et actuel président du palais de l’Avenue Wilson de renchérir «On est un lieu un peu pilote dans ce domaine. Nous considérons que nous ne sommes pas une institution comme les autres, mais une post-institution qui expérimente des modèles.»[6]

Pourtant, ce choix stratégique est loin de faire l’unanimité auprès des autres pontes de la culture. Ainsi, nombre de grands musées refusent encore les initiatives public-privé de coorganisation d’expositions temporaires, à l’instar du Louvre, du Quai Branly, ou du Centre Pompidou. «On ne choisit pas une exposition sur un soutien financier»[7] assène Fabrice Hergott, directeur du Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris. Si  les conservateurs considèrent d’un œil critique de tels partenariats, c’est qu’ils craignent de sacrifier leur indépendance sur l’autel de la rentabilité. Car qui dit mécénat privé dit, d’une façon ou d’une autre, retour sur investissement. De telles opérations ne sont jamais à somme nulle. Qu’il s’agisse de retombées en termes financiers ou d’image de marque, les sociétés trouvent toujours quelque intérêt à cautionner de leur nom expositions et autres événements artistiques, souvent sujets à un traitement médiatique important. Ils espèrent alors (re)construire l’identité de leur entreprise, par association d‘idées entre qualités esthétiques et qualité de leurs produits. 
Mieux valait s’armer de patience pour qui souhaitait assister à l’exposition Hopper au Grand Palais (octobre 2012).
De jour comme de nuit, pas moins de quatre heures d’attente.

Source : François Guillot / AFP

Si, le plus souvent, ces associations profitent aux deux parties et permettent aux musées de poursuivre leur mission d’éducation, en finançant notamment des expositions intimistes d’artistes inconnus, il arrive aussi que de ce mariage entre intérêts économiques et plaisir du Beau naissent des monstres : ces expositions blockbusters très controversées, car considérées comme le symbole suprême du virage mercantile négocié par les musées. Le Grand Palais semble être devenu bien coutumier de ce genre de déliquescence artistique. On se rappellera à dessein les quatre heures de queue incontournables pour accéder  à l’exposition Edward Hopper (octobre 2012) ou, plus récemment, l’affluence  à la limite du mouvement de foule suscitée par l’exposition Velázquez (mai 2015). L’institution aurait-elle perdu toute notion du but ultime d’une exposition, i.e. présenter des œuvres pour elles-mêmes afin d’inciter le spectateur à ne pas les appréhender comme le pur produit d’une époque, le reflet d’un cadre spatio-temporel contingent, mais les percevoir comme l’expression du Beau directement accessible, et non médiatisé par une relation d’utilité sujet-objet ? Dès lors, vous commencez à discerner le danger de ce mécénat d’entreprise, pourtant nécessaire aujourd’hui à la survie des musées : peut-on raisonnablement accepter que les entreprises deviennent «les nouveaux arbitres des élégances et des goûts»[8] ? 

Si certains musées sont encore réticents à s’associer davantage aux entreprises, c’est que le mécénat de ces dernières présente un aléa économique certain. Les musées, qui se remettent  entièrement à ces sources de financement annexes, se soumettent du même coup aux fluctuations de la situation macroéconomique mondiale, et leurs revenus sont conditionnés à la bonne santé de ces entreprises. Or, on notera que la situation économique de ces mécènes «providentiels» que sont les entreprises se détériore. Ainsi, de 975 millions d’euros en 2007, le mécénat entrepreneurial est passé à 494 millions d’euros en 2012, soit une division par deux des financements privés alloués aux musées[9].  Pour preuve, le tiers (370 000 €) du coût de l’exposition Basquiat, tenue en 2010 au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, avait été s upporté par Carmignac Gestion ; en 2013, il aura fallu, à ce même musée, trouver pas moins de quatre mécènes pour couvrir le tiers du coût de l’exposition Keith Haring (soit 440 000€)[10]. C’est que la crise n’a épargné personne, et les musées qui ont tout misé sur ce type de financement  en essuient aujourd’hui les plâtres. 



Cet article reprend en partie l'article originellement publié sur Trop Libre

[1] Rapport Muséostat 2009 du ministère de la Culture et de la Communication. Repéré sur : http://www.culture.gouv.fr/culture/politique-culturelle/MUSEOSTAT_2009.pdf

[2] Rapport 2011 de la Cour des Comptes sur les musées nationaux. Repéré sur : http://www.ccomptes.fr

[3] Rapport 2011 de la Cour des Comptes sur les musées nationaux. Repéré sur : http://www.ccomptes.fr

[4] Rapport d’activités annuel 2014 du Palais de Tokyo

[5] Art Media Agency. (2013, 28 décembre). Entre fonds publics et privés : le financement des musées. Repéré sur le site de l’Art Media Agency : http://fr.artmediaagency.com/78301/entre-fonds-publics-et-prives-le-financement-des-musees/

[6] Elvin, Florence. (2013, 2 décembre). Les musées fragilisés par le mécénat. Repéré sur le site du Monde.fr : http://www.lemonde.fr/culture/article/2013/07/17/les-musees-fragilises-par-le-mecenat_3448912_3246.html

[7] Elvin, Florence. (2013, 2 décembre). Les musées fragilisés par le mécénat. Repéré sur le site du Monde.fr : http://www.lemonde.fr/culture/article/2013/07/17/les-musees-fragilises-par-le-mecenat_3448912_3246.html

[8] Vivant, Elsa. (2008). Du musée-conservateur au musée-entrepreneur. Téoros, Presses de l’Université du Québec, 27 (3), pp.43-52.

[9] Warlin, Ariane. (2012, 12 décembre). Les fondations d’entreprise à vocation culturelle. Repéré sur le site de LeNouvelÉconomiste.fr : http://www.lenouveleconomiste.fr/dossier-art-de-vivre/les-fondations-dentreprise-a-vocation-culturelle-16997/

[10] Elvin, Florence. (2013, 2 décembre). Les musées fragilisés par le mécénat. Repéré sur le site du Monde.fr : http://www.lemonde.fr/culture/article/2013/07/17/les-musees-fragilises-par-le-mecenat_3448912_3246.html

280 avant Jésus-Christ. Le premier «musée» de l’Histoire naît sous les ordres de Ptolémée Ier dans son palais d’Alexandrie, à la fois sanctuaire consacré aux Muses et foyer de recherches intellectuelles. Si les fonctions originelles du musée – à savoir offrir au regard du peuple les trésors d’un patrimoine protégé et conservé pour les besoins de la recherche – demeurent les mêmes que celles de ce premier mouseîon, les enjeux auxquels il doit faire face sont aujourd’hui tout autres. Révolu le temps où le musée était avant tout un lieu calme et désert, propice à l’introspection et l’émerveillement. Révolu le temps où le commissaire pouvait faire le choix d’une exposition intimiste, portée par un nom inconnu. Révolu aussi le temps où les subventions étatiques suffisaient à couvrir le budget annuel des plus grands musées du monde. À l'heure de l'austérité et des coupes budgétaires tous azimuts, le musée français n'a d'autre choix que de revoir son mode de gestion et sa structure économique s’il souhaite survivre. Focus sur un phénomène préoccupant pour l'avenir de l'exception culturelle française. 

©  Flickr Claude 

Le musée, une entreprise pas comme les autres 

Avant d'entrer dans le vif du sujet, à savoir la marchandisation de la culture - cause et conséquence d'une «entreprenarisation» à outrance des institutions culturelles -, il convient de rappeler les spécificités du mode de fonctionnement économique muséal. Le musée a, par essence, une structure de coûts particulière : ses coûts fixes (conservation, assurance et sécurité des œuvres, charges de personnel, etc.) sont structurellement importants et incompressibles. Victime de la «maladie de Baumol»  - dite loi de la fatalité des coûts croissants -, le musée pâtit de coûts d’entretien et de conservation du patrimoine conséquents, qui ont tendance à augmenter à la vitesse du salaire d’une main d’œuvre qualifiée et des surfaces requises pour exposer leurs acquisitions. Dès lors, face  à cette augmentation croissante des coûts d’exploitation et la non-profitabilité chronique qui en résulte, l’État, lorsqu’il s’agit d’un musée public, se trouve confronté à un dilemme bien insoluble : financer des expositions toujours plus coûteuses ou laisser nombre d’acteurs sortir du marché et risquer ainsi une paupérisation de l’offre culturelle. De cette observation, William Baumol et William Bowen concluent en 1966 au besoin de financements externes, mécénat et fonds propres en tête. 

De plus, contrairement à une entreprise classique, le rôle fondamental attribué aux musées – i.e. préserver et conserver le patrimoine artistique de notre pays – grève leurs finances. Ils ne sauraient donc suivre le fonctionnement classique du marché, au sens où ils ne peuvent, par essence, rechercher la plus grande profitabilité possible. Ceux-ci sont en effet obligés de conserver une œuvre en dépôt dans leurs entrepôts plutôt que de la vendre quand bien même cette dernière ne s’insèrerait pas dans leur collection.  

À ce stade de la démonstration, il convient de rappeler qu’il existe une grande disparité de situations entre musées publics et privés. N’oublions pas que les institutions publiques sont en partie subventionnées par l’État, quand les institutions privées sont financées par des entreprises privées. Toutefois, dans les faits, la distinction entre musées publics et privés n’est pas pertinente, puisque ceux-ci relèvent des mêmes fonctions originelles de préservation, d’étude et d’éducation du public à l’art. L’État a mis un point d’honneur à créer une séparation entre ces deux typologies muséales pour le moins nébuleuse car, si les musées publics sont considérés comme des institutions «à but non lucratif», les musées privés, quant à eux, pratiqueraient une «activité a priori lucrative». L’État refuse dès lors à ces derniers la moindre subvention. Le phénomène d’« entreprenarisation » des musées sera, par conséquent, plus facilement identifiable au sein des musées publics que privés puisque, par définition, les musées privés ont bâti leur fonctionnement sur une logique mercantile, afin de pallier ce non-sens étatique.

Face à ce désengagement progressif de l’État-Providence, les musées n’ont donc d’autre choix que d’aller chercher l’argent là où il se trouve : auprès des entreprises privées et des grandes multinationales. Au risque, parfois, d’y vendre leur âme. 


Une mutation du mode de gestion des musées français déjà amorcée

Ce sont surtout les qualités de gestionnaires, financiers et communicants qui sont désormais prisées chez tout directeur de musée digne de ce nom ; un revirement de situation impensable il y a encore quelques années. Pour preuve, les partenariats se multiplient entre grandes écoles de commerce et établissements préparant au concours de l’Institut National du Patrimoine (l’ESSEC Business School propose ainsi depuis 2011 un double diplôme avec la très réputée École du Louvre). Ce phénomène est très révélateur de la nouvelle logique d'intégration des musées à l'industrie de la consommation culturelle et l'imbrication croissante entre culture et société de marché actuellement à l'œuvre. La valorisation du bien culturel passe désormais par une nouvelle orientation de l'économie de la culture, inscrite dans une logique plus capitaliste. 

Le musée - jadis «pré carré» de la Nation - a cessé d'évoluer dans un environnement protectionniste conservateur pour entrer dans le monde de la concurrence, nationale comme internationale. L'inflation muséale - due notamment à l’accroissement quasi exponentiel du nombre de musées et fondations privés (+62 % de fondations privées entre 2001 et 2013)[1] -, qui contraint les institutions culturelles à adopter des stratégies de marketing et de communication toujours plus agressives pour se différencier, menace la culture de dérive mercantile. Taux de fréquentation, collecte de fonds privés et visibilité chiffrée des expositions sont devenus les nouveaux instruments d’évaluation du rayonnement culturel des musées.  Dans ce domaine comme dans nombre d’autres, le quantitatif a supplanté le qualitatif. 

Pour preuve de cette «entreprenarisation» des musées français, qui s’intéressent de plus en plus aux retombées chiffrées,  j’en appelle au phénomène nouveau de rationalisation, qui progressivement transforme – parfois gangrène - le milieu artistique. Longtemps tenu à l’écart des mécanismes de marché par l’État – l’idéologie voulant alors que le musée ne se préoccupât pas d’être déficitaire puisque, financé par les pouvoirs publics, il aurait dû reverser ses hypothétiques bénéfices aux caisses du Trésor public -, le musée n’a jamais été encouragé à générer de revenus supplémentaires, d’autant que, pour les musées publics, une augmentation propre des revenus aurait entraîné quasi systématiquement une baisse des subventions étatiques. Cependant, tandis que les dotations publiques se réduisent comme peau de chagrin, le musée doit aujourd’hui trouver d’autres sources de financement : cela passe, en premier lieu, par une augmentation des recettes, donc la recherche de la profitabilité. 

Dès lors, vous voyez émerger la nécessité d’une rationalisation des activités muséales. On se rappellera que Taylor fut le premier à développer, en 1881, le concept de rationalisation – la fameuse «Organisation Scientifique du Travail» (OST) -, une doctrine autrefois adressée … aux industriels. Du musée-conservateur au musée-entrepreneur, il n’y a qu’un pas, désormais franchi[2]. 

Premier domaine d’activité à tomber sous le coup de la rationalisation : la maintenance, poste de dépense par excellence des musées. Ces derniers n’hésitent plus à sous-traiter leurs activités d’entretien et de conservation des œuvres et des lieux à des sociétés privées. Certains musées vont même jusqu’à sous-traiter à des partenaires privés la gestion de leurs établissements et l’organisation de leurs expositions temporaires. Ainsi, l’Institut de France – notamment propriétaire du musée Jacquemart-André et des villas Ephrusi et Kérylos – a pris le parti de déléguer à l’entreprise Culturespaces (filiale de GDF-Suez) la gestion et l’animation des lieux susnommés, moyennant finances. 

La rationalisation est aussi à l’œuvre au niveau administratif. Les musées, des suites de leur élargissement (l’établissement du Musée du Louvre est ainsi devenu le gestionnaire des musées du Louvre, Delacroix et des Tuileries en 2004) et de leur accession à l’autonomie administrative, doivent désormais appliquer de nouvelles normes comptables et de nouveaux modes de gestion directement empruntés à la sphère entrepreneuriale, dont ils n’étaient que peu familiers jusqu’alors. 

Plus révélateur encore, on voit fleurir depuis quelques années de nouveaux termes tels que «box-office», «audit», «évaluation» ou «contrôle de gestion» dans le jargon des directeurs des plus grands musées de France. Un vocabulaire qui, s’il perd en poésie, n’en gagne pas moins en management technico-commercial, et marque le tournant radical amorcé par les institutions culturelles ; tournant en partie causé par l’immixtion des entreprises privées dans l’économie muséale. 

A suivre ... 


Cet article reprend en partie l'article originellement publié sur Trop Libre

[1] Fondation de France. (2015). Les fonds et fondations en France de 2001 à 2014. Repéré sur le site de la Fondation de France : https://rsemag.neuflizeobc.fr/media/2015/09/Fonds_et_fondations_2001-2014.pdf

[2] Vivant, Elsa. (2008). Du musée-conservateur au musée-entrepreneur. Téoros, Presses de l'Université du Québec, 27 (3), pp.43-52. 



Novembre. L’air est frais, le ciel couvert et la nuit à peine tombée lorsque je croise la route de Mami Kiyoshi, une jeune artiste de 37 ans originaire du Japon, alors exposée à la Bibliothèque Nationale François Mitterrand, un lieu bien connu de la jeunesse estudiantine parisienne pour ses salles de lecture et son ambiance (presque) studieuse. Lauréate de la Bourse du Talent Portrait 2012 - un prix accordé aux jeunes espoirs du monde de la photographie, afin de les aider à s’insérer dans un univers professionnel réputé difficile -, ses photographies ornent alors les couloirs de la BNF. 


© Mami Kiyoshi, New Reading Portraits, Tokyo, Japan, 2004 

Née en 1974 à Saitama (Japon), Mami Kiyoshi se forme à la photographie et au travail de l’image à la Musashino Art University. Après quatre années passées à travailler dans un studio de photographie publicitaire de Tokyo, elle décide de se lancer comme photographe freelance et réfléchit, en parallèle, à un projet artistique : Tropical Family. Recevant de ce dernier une bourse du gouvernement japonais pour la promotion des études artistiques à l’étranger, elle organisera par la suite de nombreuses expositions en Europe et en Chine et de son projet initial, Tropical Family, naîtra la série New Reading Portraits. 

Mami Kiyoshi, la vibration chromatique 

Au premier coup d’œil, nous sommes tout d’abord arrêtés net dans notre déambulation et saisis par le jeu des contrastes, la netteté du trait et la vivacité des couleurs. Les couleurs semblent vibrer au rythme des déclinaisons chromatiques. Rapidement, nous sommes pris d’une sensation étrange à la vue de ces scènes de la vie quotidienne, pourtant si banales, mais retranscrites avec le brio d’un œil expert et averti. Dans un environnement somme toute très commun, une chose nous pose problème, et nous voilà pris de malaise. Tout ici dérange. Des couleurs criardes aux angles de vues étroits, des regards incisifs des protagonistes à la mise en scène de la vie quotidienne. Ce n’est pas de la photographie, c’est de la peinture. Édifiant. 

Mami Kiyoshi, une réalité multiple 

Mami Kiyoshi nous dit « s’intéresser à l’histoire ». Elle souhaite restituer l’histoire de ses modèles, en l’amplifiant de sa sensibilité, de son imagination, en érigeant ces derniers au statut « de bouddha, de dieux primitifs, de héros » (sic). Et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle y parvient. Port noble, regard pénétrant, calme olympien, ces modèles ne sont déjà plus humains. 

Se départissant de la photographie documentaire classique, elle commence par rencontrer ses modèles à leur domicile, discuter avec eux, leur poser des questions pour apprendre à les connaître. Que font-ils dans la vie ? Dans quelles pièces vivent-ils ? A quoi consacrent-t-ils leur temps ? Puis, elle prépare le décor et compose le portrait. 

Cependant, Mami Kiyoshi voit plus loin. A travers ces histoires personnelles, c’est la société tout entière qu’elle souhaite dépeindre. Pour ce faire, elle veut donner à voir une multitude de portraits du XXIe siècle qui, pris dans leur globalité, soient représentatifs de notre époque. Ses photographies montrent alors la multiplicité de la vie : chaque combinaison de personnes et d’objets, de meubles et de vêtements, de passions et de souvenirs, est unique. Cependant, de cette apparente diversité se dégage tout de même une unité car malgré le lieu, le pays, la culture, toutes les vies se ressemblent.

 Ses travaux sont à (re)découvrir ici.

...

Situé dans le quartier de la « Nouvelle Athènes », au cœur du 9e arrondissement, au n°16 de la rue Chaptal, le musée de la Vie Romantique est un havre de paix méconnu, pétri de culture et façonné par les grands esprits du début du XIXe siècle. C’est ici en effet, dans cet îlot de verdure à l’écart de l’agitation parisienne, qu’a vécu entre 1830 et 1858 le peintre Ary Scheffer. Haut lieu du mouvement romantique, il expose les souvenirs de la romancière George Sand, une amie proche du peintre d’origine hollandaise. 
 
Vue de l'entrée du musée de la Vie Romantique, rue Chaptal (9e arrondissement)

Une volée de marches nous permet de pénétrer dans l’univers intime de l’écrivain ; écrin frais à l’ombre des acacias et l’un des derniers exemples de maisons d’artistes construites sous la Restauration et la Monarchie de Juillet. Tandis que le rez-de-chaussée est consacré aux souvenirs, meubles, bijoux et portraits d’Aurore Dupin – le nom de ville de George Sand – et de sa famille, les étages supérieurs se parent des œuvres de l’artiste Ary Scheffer et d’autres romantiques. On y apprend pêle-mêle les origines royales de l’écrivain - descendante directe de Maurice de Saxe, Maréchal de France, et dont la grand-tante n’est autre que  Marie-Josèphe de Saxe, mère de Louis XVI – sa passion pour les joyaux, l’extrême finesse des doigts de Chopin, la captivante, mais néanmoins morbide, mode des bracelets tressés en cheveux naturels, et bien d’autres choses encore. 
 
Jean Masse, Tabatière du maréchal de Saxe

On y découvre aussi la surprenante technique picturale dite « de la dentrite », très appréciée de George Sand et de son fils, Maurice ; technique que la romancière rebaptisa « l’aquarelle à l’écrasage ». La couleur est déposée au pinceau sur le papier avant d’être pressée, encore humide, avec une feuille absorbante pour obtenir des taches aléatoires. George Sand dira que « cet écrasement produit des nervures parfois curieuses. [Son] imagination aidant, [elle] y [voit] des bois, des forêts ou des lacs, et [elle] accentue les formes vagues produites par le hasard ». Une fois déterminé le sens qu’elle souhaite donner aux formes qu’elle y lit, elle travaille ensuite certaines lignes à l’aiguille et  à la plume, avant de rehausser ce paysage de couleurs douces aux tonalités froides à l’aquarelle. 

George Sand, Paysage
 
L'ancienne atelier d'Ary Scheffer accueille
aujourd'hui un salon de thé, à l'ombre des acacias.
Si le cœur vous en dit et que vous vous sentez capable d’attendre un certain temps à l’ombre des acacias, le temps peut-être de vous remettre de cette formidable immersion dans le Paris artistique du début du XIXe, on ne saurait que trop vous conseiller de rester prendre un thé dans le jardin du musée, bien à l’abri d’un rideau de roses trémières et de fleurs en pot. Le temps de prendre des forces avant de vous extirper péniblement et à regret de ce bout de campagne en plein cœur de Paris pour retourner à l’agitation de la vie quotidienne. Un musée incontournable pour ceux qui souhaitent remonter le temps du Montmartre bohème !


A quelques semaines de l’ouverture de la très attendue «Conférence de Paris sur le climat» - COP21 pour les intimes -, des artistes du monde entier se sont fait, à leur manière, les porte-paroles de la protection environnementale. Simple vitrine médiatique ou nouveau tournant de l’art engagé, telle est la question. 


2009, aux origines du Tout

Rappelons qu’en 1992 avait lieu le Sommet de la Terre à Rio, la première réponse politique internationale aux interrogations alarmantes du réchauffement climatique. A cette occasion, 195 pays – soit la quasi-totalité des pays du globe – ratifièrent une convention visant à stabiliser le degré de concentration atmosphérique des gaz à effet de serre. Entrée en vigueur le 21 mars 1994, elle créa un précédent planétaire historique et reste tristement à ce jour l’unique accord universel en matière de défense de l’environnement. Dès lors se tiendrait, chaque année, la Conference Of Parties (COP), rassemblant tous les pays dépositaires de la convention autour des grandes problématiques du réchauffement climatique. La première de ces COP eut lieu à Berlin en 1995. Il faudra, cependant, attendre 2009 et le Sommet de Copenhague pour voir l’art prendre part à la discussion. Et cette irruption dans les affaires politiques jalousement tenues à l’écart du monde culturel porte un nom : RETHINK. 




Thomas Saraceno, Biospheres
Des bulles de plastique reliées entre elles par des câbles,
 qui retranscrivent la vision de l’artiste de l’interconnexion 
entre les écosystèmes. 
31 octobre 2009. Copenhague. Tandis que les hommes politiques de tous bords s’assoient à la table (on l’espère en bois issu de forêts éco-certifiées) des négociations, 26 artistes contemporains nordiques et internationaux voient leurs travaux exposés dans quatre lieux historiques de la cité danoise. Si les travaux de Tomas Saraceno, Henrik Håkansson, Superflex ou Olafur Eliasson – et bien d’autres encore – semblent aux antipodes, chaque contribution ouvre de nouvelles perspectives sur le climat et l’environnement  dans l’espoir, affirme alors la ministre danoise du Climat et de l’Energie, Connie Hedegaard, que l’art puisse «agir comme une source d’inspiration et initier une réflexion». De ce jour, et malgré l’échec des négociations de Copenhague, les artistes devinrent des interlocuteurs privilégiés des COP, avec lesquels il allait désormais falloir composer. 



Art of Change 21 : le masque anti-pollution à l’heure du selfie

Bright Ugochukwo Eke, Acid Rain
2015 et la COP21 ne seront donc pas en reste en matière artistique puisqu’ils sont devenus les incubateurs de projets d’envergure. A la tête de cette réflexion esthétique, on ne trouve pas un, pas deux, pas trois artistes, mais bien 21 « accélérateurs du changement » - comme ils aiment à s’appeler -, réunis au sein d’une association internationale alliant l’Entreprenariat social, le Digital, l’Art et les Jeunes. Fondée en 2014 par Alice Audouin – auteur, conseillère en communication responsable et pionnière du développement durable – et parrainée par l’artiste danois de renom Olafur Eliasson et l’entrepreneur social Tristan Lecomte, l’association Art of Change 21 souhaite sensibiliser le public au réchauffement climatique et lui faire prendre conscience de l’urgence de la situation. En somme : réussir là où la science a échoué.  

Parmi les nombreux projets qu’elle compte, l’un mérite que l‘on s’y attarde, tant pour sa mise en œuvre disruptive que pour sa dimension internationale. MASKBOOK est né d’une constatation : qui, aujourd’hui, ne sait ce qu’est un selfie ? Et si cette pratique souvent égocentrique, parfois ridicule (ou inversement suivant la pose), popularisée par la génération Instagram, servait une cause plus noble, une cause qui dépasse la simple photo-souvenir pseudo artistique ? C’est le pari de la photographe chinoise Wen Fang. Le concept : chaque citoyen est invité à poser avec un masque anti-pollution, puis à partager son œuvre sur le site internet Maskbook.com. Les milliers de portraits ainsi collectés à travers le monde seront ensuite projetés sur un bâtiment parisien emblématique pendant toute la durée du Sommet. L’on gage que cette initiative labellisée COP21, qui a déjà séduit des milliers de personnes à travers le globe, ne s’arrêtera pas en si bon chemin.  

© Art of Change 21
© Art of Change 21


Alain Fouray, de la poubelle au Sénat

Alain Fouray, plaques de métal poinçonnées
© Alain Fouray 
A une échelle moindre, d’autres artistes ont aussi pris le parti de s’engager dans la lutte contre le réchauffement climatique. Alain Fouray est de ceux-là. Actuellement exposé à l’Orangerie du Luxembourg dans les jardins éponymes, le photographe français de soixante-trois ans nous dévoile, dans une ambiance laissée volontairement brute, sa nouvelle exposition Re-cyclages. Sous les doigts de ce virtuose de la pellicule, les déchets prennent vie, vibrent et s’animent d’une beauté inconnue. Ses clichés ne donnent, cependant, pas seulement du beau à voir, mais aussi et surtout matière à réflexion. C’est en sillonnant pendant près de deux ans les sites de recyclage de la France entière que lui vint l’idée de s’intéresser à la deuxième vie des objets recyclés. Mise en regard de l’exposition sur la première édition des « Creative Awards by Saxoprint » de WWF – un concours  de créations publicitaires professionnelles et amatrices sur le thème de la sensibilisation des 18-25 ans au réchauffement climatique -, le travail d’Alain Fouray ne lasse pas de porter un regard interrogateur – presque dérangeant – sur notre société de consommation, sur l’éternel aller-retour de l’objet-déchet, à quelques semaines de l’ouverture de la COP21. 


Alain Fouray, chutes de bobines© Alain Fouray 
Penser l'homme, panser l'arbre 

Enfin, à l’occasion de ce rassemblement planétaire initié par l’ONU, les éditions de La Manufacture de l’Image ont réuni soixante-six artistes contemporains autour d’une thématique littéraire commune : les liens homme-arbre. De Nils Udo à Jean Nouvel, d’Ernest Pignon Ernest à Antony Gormley, l’ouvrage Ar(t)bre est un plaidoyer vibrant d’esthétisme en faveur de la lutte contre la déforestation et la protection des populations gardiennes des forêts primaires et affirme le pouvoir de l’art comme vecteur d’une parole engagé et porteur d’un regard disruptif éclairé, bien loin des discours politiques policés. Une bonne façon - labellisée COP21, cela va de soi - de donner un souffle nouveau et inédit à une rengaine vidée de sens, assourdie depuis les années 2000 et l’irruption des cours d’EDD (Education au Développement Durable) dans les écoles primaires. 


Ainsi, au travers de ces différents exemples qui ne sont que la partie émergée de l’iceberg du nouvel  art « vert » - probablement le dernier qui ne soit pas encore menacé par la fonte de la calotte glaciaire -, l’on découvre une communauté artistique plus décidée que jamais à faire parler d’elle et entendre sa voix. Dans la digne lignée d’Hugo et ses Châtiments, de Picasso et son Guernica, de Capa et son Soldat républicain, les dépositaires directs de cet art engagé se sont d’ores et déjà positionnés contre un gouvernement débile et velléitaire : ils ne tolèreront pas un nouvel avortement des négociations internationales en matière de protection environnementale. Il ne reste plus qu’à espérer que cette énième conférence saura leur donner raison et rendre justice à leurs œuvres. 


Cet article a originellement été publié sur le site Trop Libre